Les niveaux de l’écriture
Hier, j’ai fait un tirage du Yi Jing* sur ce que pourrait être cette nouvelle année de ma vie. Je pensais que cette année faisait encore partie de mes 70 ans, mais je comprends qu’on peut aussi la percevoir comme ma 80ème année, c’est-à-dire le début de mes 80 ans, ce qui me plaît moins. Toutefois, selon le Petit Robert, un octogénaire est quelqu'un qui a entre 80 et 89 ans, et un septuagénaire quelqu'un qui a entre 70 et 79 ans. Comme je ne suis ni l’un ni l’autre, serais-je, pendant cette année, de nouveau un jeune homme ? C’est ce que pense Ariella… Le tirage est le 22, Embellir (ou la grâce), avec la 5ème ligne mutante, ce qui donne le 37, Gens du clan, comme perspective. Ce n’est pas mauvais. Je vais continuer à embellir le monde par mes modestes activités. Le 22 concerne aussi le rapport entre l’intérieur et l’extérieur, entre le fond (ou l’essence) et la forme, entre le spirituel et le matériel, ce qui correspond bien à mes préoccupations actuelles. De quel clan fais-je encore partie, c’est moins clair.
Mon idée de me retirer du monde, sans machines, est-elle compatible avec l’accomplissement de ce que je considère comme l’œuvre de ma vie, l’écriture de mes regards sur la vie ? C’est un dilemme, qu’il faut aborder à plusieurs niveaux.
Le premier est le plus simple : continuer à écrire. C’est ce qui me fait du bien. Et je pourrais recommencer à écrire à la main dans des cahiers, comme je le faisais au début de l’écriture de mon Journal, même si cela me devient un peu difficile, et ce n’est pas très rationnel si je ne désire pas seulement écrire, mais faire quelque chose de mes écrits, et c’est là que cela se complique.
À partir de 2006, j’ai commencé à saisir les 75 cahiers manuscrits de mon Journal, puis je les ai corrigés pour les déposer à l’APA. Ensuite j’en ai tiré l’Essence du Journal, les textes Regarder la vie, il y en a plus de 500, que je partage sur mon blog et ma newsletter, et dont j’ai publié deux recueils de 50 textes chacun. Ce travail de correction, d’organisation et de diffusion m’occupe depuis plus de 15 ans, et me prend beaucoup beaucoup plus de temps que celui que je passe à écrire. Mais j’aime le faire et il me fait du bien aussi. Il satisfait mon perfectionnisme et mon besoin d’avoir un produit fini que je puisse partager et publier. Bien sûr, c’est une tâche qui n’est jamais finie puisque je continue à écrire de nouveaux textes. Mais, pour l’essentiel, qui était de corriger et de préparer les anciens textes aux différents usages que je pourrais en faire, elle est bientôt terminée. Je pourrais la terminer cette année, si je m’y consacre entièrement, ce que j’ai l’intention de faire. Ces textes seront alors prêts pour être postés sur mon blog et ma newsletter, pour composer de nouveaux recueils, et l’anthologie que je prévois de publier. Ils figureront déjà sur une série de sites web, qui restent à compléter. Ainsi, cette première version de l’œuvre de ma vie sera bientôt terminée, mais sera-t-elle définitive ? Par la suite, je pourrais continuer à corriger et peaufiner ces textes, mais je pourrais aussi m’arrêter là, et me contenter de la correction des nouveaux textes de l’année en cours. L’avenir le dira. Pour finir cette première, et peut-être dernière version, l’ordinateur est indispensable. Et comme ce travail est déjà fait à 80 ou 90 %, je ne vais pas l’abandonner.
Le premier niveau, écrire, et le deuxième niveau, corriger, préparer et organiser les textes, sont satisfaisants et ne posent pas de gros problèmes. Le troisième niveau, c’est la diffusion de ces textes. Pour l’instant, elle est très limitée, puisqu’ils n’ont que quelques dizaines de lecteurs, entre le blog, la newsletter et les recueils. Comme mes autres livres, à part Le guide du bonheur qui en a eu quelques milliers. Est-ce que cela justifie l’énorme travail de correction et de préparation de ces textes ? C’est une question absurde, puisque ce travail est de toute façon presque terminé, et que l’utilité et l’importance d’un travail ou d’une activité sont des notions subjectives et indéfinissables. Comme disait Ayya Khema, si un de mes livres profite à une seule personne, je ne l’aurais pas écrit en vain. Trouver une large audience pour mes activités a toujours été très difficile pour moi, que ce soit pour ma peinture, mon écriture ou mes séances. Je ne suis pas un bon vendeur, et le marketing n’est pas une activité qui m’enchante. J’ai fait beaucoup d’efforts dans ce sens depuis un an, sans résultat, aussi je ferais mieux d’accepter cette situation. Je fais plaisir à quelques personnes, mais mes activités ne vont pas changer le monde, en tout cas pas sur le plan matériel et pas dans l’immédiat. Mais l’influence qu’elles pourraient avoir sur d’autres plans, et en d’autres temps, est de nouveau difficilement définissable. Pour augmenter l’audience de mes écrits, il faudrait que je trouve de l’aide, car je n’y parviendrai pas tout seul.
Le niveau suivant, c’est la publication et la distribution de mes écrits dans le monde matériel. D’abord au format papier : tous mes livres ont été auto-publiés à de petits tirages (sauf Le guide du bonheur, tiré en français et en anglais à 3000 exemplaires), il m’en reste un petit stock, ils ne sont par contre pas distribués. Lorsque je passais les étés en France, j’offrais ces livres à mes amis et en vendais quelques-uns lors de mes expositions de peinture. En Thaïlande, l’intérêt pour les livres en français est très limité. Le Journal a été imprimé à 5 exemplaires je crois. Il y a en a un ici, un chez Élisabeth, peut-être un chez ma sœur et 2 à l’APA (2 exemplaires de mes livres sont aussi déposés à l’APA). Mes livres sont aussi publiés au format numérique (ePub et PDF), ils sont en vente chez Librinova et sur 200 librairies en lignes depuis plus de 6 mois, mais deux livres seulement ont été vendus. Depuis quelques mois, je les mis en téléchargement gratuit, mais cela ne marche pas mieux. Le Journal est aussi disponible au format numérique, pour l’instant il n’a eu qu’un lecteur, mon ami Jean-Claude Strobino. Une partie des textes Regarder la vie, et certains chapitres du Guide du bonheur, sont disponibles sur mon blog Lumière de sagesse. La plupart de ces textes sont publiés sur une série de sites web, qui vont encore être complétés, auxquels renvoient ma newsletter. Mes projets de publications pour le futur : je déposerai cette année à l’APA le Journal 2020 et 2021 et le livre La vie – jeu, art ou mission ; mes nouveaux écrits ou livres (peut-être de nouveaux recueils Regarder la vie) seront disponibles au format numérique, mais peut-être pas au format papier. Si je termine une première version de l’anthologie Regarder la vie, elle sera aussi disponible au format numérique et j’en imprimerai probablement quelques exemplaires (comme pour les futurs épisodes du Journal). À côté du Journal et de son Essence, il y a quelques autres textes que j’ai l’intention de terminer, corriger et publier en éditions confidentielles.
Le dernier niveau, c’est ce qui adviendra de mes écrits après ma mort. Est-ce quelque chose dont je dois me soucier ? C’est une question plus philosophique que matérielle, dont je pourrais débattre en détail. Pratiquement, pour les livres papier, que faire déjà de mon stock, que j’aimerais dissoudre ? Les rares personnes qui ont acheté ou reçu certains de mes livres les transmettront peut-être à la postérité. Le Journal et les livres déposés à l’APA vont subsister. Seront-ils lus un jour ? Peut-être. Mes sites web et les fichiers numériques qui sont sur mon ordinateur risquent bien de disparaître avec moi, à moins que je trouve quelqu'un à qui vendre ou léguer mon atelier d’écrivain, comme j’ai vendu mon atelier de peintre, quelqu'un qui aurait peut-être plus de talent que moi pour la diffusion de mes écrits, puisque, selon les Gene Keys, mon travail et mes idées devraient avoir une reconnaissance posthume. Cela ne dépend plus de moi, mais ce qui en dépend encore, c’est de préparer au mieux mon héritage littéraire, en attendant l’ange à qui je pourrais le transmettre. Je pourrais aussi le copier sur une série de disques durs que je remettrais à quelques anges potentiels. Alors, je pourrais me séparer de mes machines…
* Yi Jing (chinois) : littér. le classique des changements. Il s’agit du Livre des mutations, un des classiques de la culture chinoise qui décrit 64 situations types représentées par des hexagrammes. Le Yi Jing est un livre de sagesse que les Chinois utilisent depuis plus de trois mille ans comme oracle. Les noms des hexagrammes ainsi les textes du jugement et des lignes mentionnés sont empruntés à la traduction littérale de Cyrille Javary (Yi Jing, le livre des changements, de Cyrille Javary et Pierre Faure).
* Gene Keys : littér. clés génétiques. J’ai utilisé la traduction française pour désigner les 64 aspects de la personnalité humaine décrits par Richard Rudd (qui correspondent aux 64 codons du code génétique humain, aux 64 hexagrammes du Yi Jing et aux 64 portes du Human Design). J’ai gardé l’anglais Gene Keys pour désigner le système et les enseignements développés par Richard Rudd, l’organisation qu’il a mise en place pour les diffuser et le titre de son livre.
8 juillet 2022, Chiang Mai