Projets créatifs
Je suis toujours dans cet état d’incertitude, de doute, de confusion. J’essaie de l’observer. Il part de l’idée que je dois faire quelque chose, avoir des buts, des objectifs, des projets. J’ai probablement toujours fonctionné comme ça. Et je remarque comme mon énergie et mon enthousiasme reviennent dès que j’ai un nouveau projet : comme la traduction des mots des clés génétiques* avec Laurent ou l’accrochage de mes tableaux dans les bureaux des Missions locales. Je me sens bien aussi quand je travaille sur des projets créatifs : peindre, écrire des livres, créer des sites web ou participer au projet SimpleDifferent avec Yorick.
En fait, je me sens bien quand je fais quelque chose de créatif, qui me semble utile et bénéfique ; ou quand je fais simplement un projet, même s’il n’aboutit pas. L’idée, le projet, est peut-être même plus excitant que son exécution. Le projet se situe toujours dans une forme d’utopie : les possibilités ont l’air infinies ; alors que sa réalisation doit affronter les limitations du monde matériel, et implique l’investissement d’effort, de travail, de discipline, de moyens matériels.
Mais dès que je ne fais rien – que je semble n’avoir ni projets ni buts dans ma vie –, ou que je n’arrive pas à me mettre à faire quelque chose – que je manque de motivation et d’énergie, comme en ce moment –, je me sens mal. Qu’est-ce que cela veut dire ? Faut-il écouter mon ressenti et aller dans le sens de ce qui me fait du bien ; ou écouter les théories et les préceptes des sages ? Ne pas avoir de projets, ne pas être dans une histoire, comme dit Éric Baret*. Pratiquer le wu wei*, n’agir qu’en réponse aux demandes de l’environnement, dans la spontanéité et non la préméditation. Observer l’attachement aux désirs, la Deuxième Noble Vérité*. Le désir pour les plaisirs des sens, pour se sentir bien, ou devenir quelqu’un : un artiste, un bienfaiteur, un sauveur du monde. Ou vouloir éviter, se débarrasser des états inconfortables : le doute, la confusion, l’ennui, se sentir inutile. Observer comment je me sens dans le présent, quand je ne fais rien, et laisser cesser la confusion, l’inconfort ; puis voir ce qui se passe si quelque chose se manifeste : une évidence qui fait disparaître l’illusion du choix et la fuite dans le futur par des projets.
* Clé génétique : traduction française de Gene Key. Terme utilisé, dans le système des Gene Keys, pour nommer les soixante-quatre aspects de la personnalité humaine (qui correspondent aux 64 portes du Human Design et aux 64 hexagrammes du Yi Jing).
* Baret (Éric) (né en 1953) : disciple de Jean Klein, Éric Baret enseigne le shivaïsme tantrique du Cachemire. Il est devenu mon principal maître spirituel depuis notre rencontre en 2002.
* Wu wei (chinois) : littér. ne pas faire, non-action. Le wu wei est une philosophie de vie prônée par les taoïstes, qui consiste à s’abstenir de toute intention d’accomplir quoi que ce soit. Le pratiquant du wu wei se contente de suivre le flux de la vie en répondant spontanément aux besoins et aux demandes qui se présentent.
* Quatre Nobles Vérités : ce sont les Vérités de la souffrance, de l’origine de la souffrance, de la cessation de la souffrance et de la voie conduisant à la cessation de la souffrance, ou Noble Voie Octuple. Les Quatre Nobles Vérités sont considérées comme la base de l’enseignement du Bouddha et sont reconnues comme telle par tous les bouddhistes.
17 juin 2010, Cabrières d’Aigues